15 juin 2021
Le comité Pro Persona est un cercle de réflexion composé de philosophes, théologiens et d’experts de la finance, il vise à approfondir les questions éthiques qui se posent à l’activité financière et économique.
Sa mission ? Contribuer à une recherche fondamentale et appliquée en faveur d’une finance au service de l’économie et d’une économie au service de la personne humaine. Pour partager les fruits de ses réflexions, Pro Persona édite des Cahiers, découvrez le neuvième numéro de la séquence « Investissement éthique » :
Habituellement, l’investisseur imite l’environnement dans lequel il se trouve et, si l’objectif dominant est le profit maximal, spontanément il ne voit pas de mal à cela. En revanche, celui qui reconnaît qu’investir est aussi une vocation, un appel à faire le bien, comprend que cela requiert de sa part des changements dans sa manière de penser et d’agir. A quel genre de conversions l’investisseur est-il dès lors appelé ?
Pas seulement éviter le mal, mais faire le bien
Toute vocation requiert et suscite des conversions, c’est-à-dire un ensemble de changements aussi bien dans l’ordre de la pensée que de l’agir, sans lesquels cette vocation reste un beau projet de vie, mais sans traduction concrète. En l’espèce, il ne suffit pas que l’investisseur s’abstienne de ce qui est immoral. Il faut encore qu’il apporte positivement sa propre contribution, qui soit à la hauteur de sa vocation à faire le bien. Or le discernement et la prise en compte des enjeux actuels appellent l’investisseur à retrouver la dimension humaine de l’investissement, le sens de la connexion avec l’économie dans son ensemble, le sens du bien commun, et le sens de l’initiative et de l’innovation.
Retrouver la dimension humaine de l’investissement
Cela consiste, en premier lieu, pour l’investisseur financier, à se réapproprier son acte d’investir dans son sens le plus profond et dans sa valeur la plus haute. Il doit reprendre conscience des responsabilités attachées à ses propres actions, non seulement de sa responsabilité juridique, mais aussi et surtout de sa responsabilité morale, qui est inhérente à sa nature de personne humaine. Tout cela s’applique à la fois à celui qui investit en direct, à celui qui délègue la réalisation ou la gestion de ses investissements à un tiers, et à ce tiers lui-même, dans les principes qu’il met en œuvre dans sa gestion pour le compte d’autrui. Tout investisseur doit avoir clairement à l’esprit que ces investissements sont des choix qui reflètent ses options, ses préférences, son histoire, son engagement : ils révèlent ce qu’il est.
En second lieu, retrouver la dimension personnelle de l’investissement financier consiste à reconsidérer et à rééquilibrer la relation que chaque investisseur entretient avec son environnement. En l’espèce, il s’agit de refuser de succomber à la tentation du conformisme. En tant que personne unique, originale et libre, l’investisseur se doit de résister au mimétisme, si courant dans le domaine financier, tout en restant bien évidemment attentif aux tendances du marché, dont il n’est ni possible ni souhaitable de faire abstraction.
En effet, investir personnellement n’est pas investir de manière solitaire, comme si le bon investisseur était nécessairement celui qui avait raison contre tout le monde. Il doit avoir l’humilité de rester à l’écoute du marché. Mais cela ne le dispense pas de la nécessité de se forger sa propre conviction, d’appréhender avec lucidité les défauts du système, sans penser qu’une remise en cause individuelle est, au mieux, vaine, et, au pire, périlleuse, parce qu’elle ne serait pas simultanée chez tous les autres acteurs. Il est en effet erroné de penser qu’une conversion doive être collective avant d’être individuelle, car qu’est-ce qu’une conversion collective, sinon la résultante de conversions personnelles ? Ce ne sont pas d’abord les changements de structures, aussi nécessaires et bénéfiques soient-ils, qui convertissent les personnes, mais ce sont bien souvent les conversions personnelles qui s’expriment dans les mutations institutionnelles. L’initiative du changement doit donc venir des investisseurs eux-mêmes. C’est d’autant plus vrai qu’ils peuvent changer leur comportement dans un sens éthique sans en subir de détriment.
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